Le 11 juillet 2005, Joschka Fischer, alors ministre fédéral des Affaires étrangères chargeait une commission d’historiens indépendants d’enquêter sur le rôle du Ministère des Affaires Etrangères allemand durant la période de 1933 jusqu’ à 1945 et sur sa responsabilité dans l’holocauste.
Ici, la liste des historiens mandaté pour ce travail:
http://www.historikerkommission-aa.uni-marburg.de/mitglieder.html
Ils viennent de sortir un document de quelques 900 pages, fruit de leurs recherches, d’où il ressort que ledit ministère, dont on avait , après la guerre, plus ou moins minimisé le rôle dans la déportation et l’élimination des juifs était un des piliers incontournables du système nationalsocialiste.
De ce livre intitulé :" Das Amt und die Vergangenheit = la fonction et le passé", l’actuel ministre des Affaires Etrangères Guido Westerwelle souhaite faire un ouvrage de base dans la formation des jeunes diplomates.
Ce document révèle que , malgré une résistance (minoritaire) au sein de l’institution, celle-ci fut partie prenante dans dans les persécutions systématiques contre les juifs.
Dans de nombreux cas, des membres du service étaient directement liés à la déportation des juifs, comme en témoigne p-ex une note de frais d’un diplomate dont le motif du déplacement, clairement exprimé, afin de se faire rembourser de son voyage était :« liquidation des juifs. »
Le ministère a joué également un rôle actif dans la déchéance de leur nationalité de personnages tels que l’ancien chancelier Willy Brandt ou encore l’écrivain Thomas Mann, prix Nobel de littérature 1929.
Beaucoup de diplomates poursuivirent, malgré leur passé chargé, leur carrière au sein de la République Fédérale. Des criminels de guerre auraient également été prévenus par les soins de la « Rechtschutzstelle » du ministère de leur arrestation imminente dans d’autres états.
Fischer, Westerwelle et Steinmeier ont salué la sortie de cette étude qui devrait être présentée jeudi prochain à Berlin.
http://www.welt.de/newsticker/dpa_nt/infoline_nt/brennpunkte_nt/article10491301/Auswaertiges-Amt-tief-in-Holocaust-verstrickt.html
Je ne comprends pas pourquoi le MAE allemand aurait dû faire cavalier seul, entrer en dissidence contre la politique nationale-socialiste, et qu’on lui reproche maintenant d’avoir fait cause commune avec le régime NS, comme si le MAE était une entité à part pouvant mener sa propre politique.
Le ministère des Affaires étrangères est tout de même, par définition, le représentant d’un gouvernement et de sa politique à l’étranger, non? Et l’on demande à ses fonctionnaires une loyauté absolue, c’est normal. Vous auriez vu par exemple Gromyko, qui fut longtemps le MAE d’URSS, se faire le porte-parole de la dissidence soviétique?
Je ne suis pas historien, mais je pense que Fischer désirait faire faire la lumière sur ce qui d’après cette étude apparait comme une légende montée de toutes pièces par les héritiers du AA ,à la fin de la guerre .Qui, mieux que des historiens indépendants et de nationalités différentes pouvait exécuter au mieux ce travail de rétablissement de la vérité historique?
On sait qu’à la fin de la guerre un processus d’évaluation était intervenu, qui déterminait qui avait été Täter (coupable), Mitläufer ( suiveur) et Entlasteter (innocenté).Dans l’urgence de cette époque, certains sans aucun doute et non des moindres étaient passés à travers les mailles du filet.
Si l’étude en question rétablit la vérité historique, cela ne peut, à mon sens qu’être une chose bénéfique, non ?
De toute façon, le travail de n’importe quel ministère des Affaires étrangères est de monter des réseaux, tant commerciaux que politiques, tant pour forger une politique d’alliance que pour préserver ses arrières si les choses tournent mal. Et souvent, ces réseaux fonctionnent au niveau des fonctionnaires eux-mêmes. Il n’était donc pas étonnant qu’il y ait eu certains arrangements après la chute du régime nazi avec les Anglo-Saxons, qui auraient favorisé une mise hors cause de personnalités fortement compromises.
Un ministère qui fait son job, c’est pas un scoop, mais les légendes politiques des années 50 ont la dent dure, je comprends que Fischer ait eu envie de clouer le bec historico-scientifiquement à certains droiteux qui jouent les naifs.
La seule étude qui m’intéresse dans ce contexte, c’est le róle des MAE américains et anglais dans le recrutement d’anciens de la gestapo et autres personnages qui se sont illustrés par leur efficacité. L’anticommunisme primaire de cette époque pourrait aussi passer au jugement de l’histoire…
Idem pour Adenauer, qui a pratiquement protégé tous les nazis qui croisaient son chemin… j’arréte là, je vais devenir méchant.
On est bien d’accord sur ce point, mais Fischer , dans le cadre de ses fonctions ,ne pouvait guère faire travailler une commission d’historiens sur les MAE américains et étrangers, non ?
Oui, en effet. Je me suis un peu emporté sur le sujet.
Je crois que Fischer, en homme de gauche provocateur, a voulu appuyer là où ça fait mal. Le patriotisme, même sain, se nourit aussi de ces mythes politiques fabriqués sur mesure à un moment clef de l’histoire. Remettre les points sur les i n’était vraiment pas une mauvaise idée.