Source : Les Nouvelles d’Allemagne du 12.04.06
Après avoir longtemps reculé, la religion rencontre aujourd’hui un nouvel attrait
Après avoir massivement reculé depuis les années 1960 et 1970, le christianisme est-il en train de connaître un regain de vitalité en Allemagne ? C’est la question que pose aujourd’hui dans les colonnes du « Frankfurter Allgemeine Zeitung » le professeur Renate Köcher de l’Institut d’étude d’opinion Allensbach, tout juste un an après la mort du pape Jean-Paul II et l’élection du cardinal allemand Joseph Ratzinger comme nouveau souverain pontife. Selon son analyse, la forte médiatisation des événements n’a conduit qu’à un pic d’attention de courte durée à l’égard de la religion. Mais ces événements ont confirmé une tendance observée depuis le milieu des années 1990 par les sondeurs : un regain d’attractivité notable de la religion. En particulier dans les jeunes générations.
Premier fait remarquable à ses yeux : l’idée que la foi chrétienne n’a rien perdu de son actualité était partagée par 52 % de la population au début de l’année 2005, et elle s’est maintenue à ce niveau. Cette observation tranche avec la chute vertigineuse qu’a connu le sentiment d’appartenance religieuse depuis le milieu des années 1960, la vague de défections religieuses au milieu des années 1980 et l’accélération de la tendance dans l’Allemagne réunifiée. Si 55 % des Allemands de l’ouest disent avoir un sentiment religieux, la proportion tombe à 22 % en Allemagne de l’est.
De fait, explique Mme Köcher, le processus de recul de la religion s’est interrompu, contre toute attente, depuis le milieu des années 1990. Comme si le cercle des personnes possédant un sentiment religieux s’était rétréci jusqu’à atteindre son noyau dur, autour de quelque 50 % de la population. Mais les chiffres montrent un changement. La proportion des personnes pour qui la religion joue un rôle personnel important a lentement augmenté depuis 1995, passant de 35 à 42 %. Aujourd’hui, 33 % des personnes disent avoir un intérêt marqué pour les questions religieuses, contre 24 % en 1995. A l’inverse, la part des personnes qui s’en désintéressent a reculé de 32 à 24 %.
On pourrait interpréter ce regain de vitalité de la religion comme le reflet du vieillissement de la population allemande. L’argument ne résiste pas à l’analyse, affirme pourtant Mme Köcher. L’intérêt pour les questions religieuses comme l’appartenance religieuse ont augmenté dans toutes les générations, constate-t-elle, et en premier lieu chez les jeunes. L’idée que les appartenances religieuses ne vont cesser de s’affaiblir au fil du temps a, par exemple, reculé de 41 à 28 % chez les moins de 30 ans depuis 1995.
« Il est cependant difficile de juger si la culture religieuse connaît pour autant une revitalisation durable, ou si l’église et la religion sont simplement ‹ en vogue › actuellement », conclut toutefois Mme Köcher. A ses yeux, toute la question est de savoir si les églises sont armées pour comprendre et intégrer une société où toutes les options sont ouvertes et où règnent la rapidité de l’information, le divertissement et le changement perpétuel.