de rien
un extrait de ces dures journées, heureusement pendant l’été 1916
et aussi heureusement qu’il pleut moins dans la somme qu’ a Bergen ,
ce fut une victoire, et la mort de beaucoup de jeunes gens, comme mon oncle qui fut gravement blessé, en tant qu’infirmier et brancardier,
et il fut transporté à Amiens, mais il décéda deux jours après.
les combats :
(pris dans ce compte rendu ;ANCESTRAMIL)
L’ATTAQUE
Le premier objectif. - Donc, ayant travers← le bois Reinette sous une avalanche de 210 et de 105 fusants, d←val← le ravin du bois Marri│res, gravi les pentes des lisi│res Est, parcouru enfin au pas gymnastique 3 kilom│tres d’un terrain cribl← d’entonnoirs, recouvert de broussailles et inond← de mitraille, le ler bataillon du 44eme qui va mener l’attaque directe du village, entra○n← par le commandant de P←lacot et le capitaine Arlabosse, est arriv← face ¢ ses objectifs. Dix minutes, les hommes s’arr↑tent pour souffler. Devant eux, ils d←couvrent Bouchavesnes, son clocher intact, les maisons de Brioche au bord de la grand’route et la ferme de Bois Labb← vers le Sud… Mais on n’a pas loisir de s’arr↑ter davantage. En avant! Sac au dos! Debout ! Les chefs de section d←collent de leur troupe de 10 m│tres, indiquent la direction et les objectifs. Garde ¢ vous! Instinctivement, tous ont joint les talons, puis, au signal, d’un seul bond, la vague s’←lance. Elle passe notre premi│re ligne fix←e dans des trous d’obus aux abords de la grand’route, et si entra○nante est son allure qu’elle enl│ve une section de chasseurs. L’attaque est men←e d’un bond ¢ la baonnette jusqu’¢ la route sous le feu des mitrailleuses de Brioche et de la partie haute de Bouchavesnes. Quelques fractions utilisent les cheminements du tortillard de Cl←ry, o elles sont dans un angle mort, les autres bourrent sur l’objectif qui est enlev← sur toute la ligne ¢ 18 h. 55. La route n’←tait occup←e que par de faibles ←l←ments qui se replient sur le village ou se rendent. Les maisons de Brioche sont prises; leurs mitrailleuses sont ¢ nous. A gauche, le bataillon du 133eme, dont le chef, le commandant Thouzelier, a ←t← bless← dans la marche en avant, est ¢ la hauteur du 44ᄚ. Il poursuit son mouvement d←bordant. A droite, un d←tachement qui devait prolonger l’attaque par le Sud ne para○t pas encore. Emp↑ch←? Retard← ? Qu’importe, l’affaire est lanc←e. Les chefs qui la conduisent ne s’arr↑teront pas. Devant eux, voici la grande tranch←e blanche de Bouchavesnes avec son r←seau de fils de fer ¢ peine d←moli, o cr←pite une mitrailleuse. Qu’y a-t-il derri│re ? On ne voit rien. Alors, pour se flanquer vers la droite, puisque les troupes qui devraient ↑tre l¢ ne paraissent pas, le chef de bataillon porte sa compagnie de r←serve sur le talus Ouest de la route, ¢ la hauteur de Brioche. Du talus Est, il fait ouvrir un feu d’enfer sur la tranch←e allemande o s’agitent de nombreux fantassins. Et on passe ¢ l’attaque du deuxi│me objectif. En avant! Le deuxi│me objectif. - Devant la brutalit← de l’attaque, l’ennemi para○t h←sitant. Des hommes se replient sur la partie haute de Bouchavesnes et, quant les Franais se pr←cipitent dans la tranch←e, seuls quelques d←fenseurs acharn←s se battent corps ¢ corps; la plupart se rendent. Cent cinquante prisonniers environ tombent entre nos mains. La situation est celle-ci. Le bataillon du 44ᄚ tient la grande tranch←e, le cimeti│re et les premi│res maisons ¢ l’Ouest du village. A gauche, le bataillon du 133ᄚ est ¢ sa hauteur vers le Nord, mais, au Sud, les troupes amies ne sont pas encore en vue. 19 heures. Les Allemands, d←sempar←s, ne r←agissent pas avec leur violence coutumi│re. Des coups de feu isol←s partent de quelques maisons organis←es pour la d←fense; l’ennemi a le sentiment de sa d←faite. Et, sur les pentes Nord-Ouest de Bouchavesnes, le bataillon du 133ᄚ continue ¢ gagner du terrain, poussant devant lui des fuyards. Le troisi│me objectif. - 19 h. 5. Le chef de bataillon donne l’ordre d’enlever le troisi│me objectif: les lisi│res Est du village. Les 1er et 3ᄚ compagnies le traverseront droit devant elles en se reliant vers l’←glise; la 2ᄚ compagnie, en r←serve, maintenue en ←chelon et ¢ droite, nettoiera le quartier Sud et progressera ensuite en suivant les lisi│res Sud, pr↑te ¢ faire face, si besoin est, ¢ la ligne de la Carri│re-ferme de Bois Labb←, qui n’est pas encore tenue par nos troupes. En m↑me temps qu’il donne cet ordre, le chef de bataillon exp←die au colonel Nieger, commandant de l’attaque, ce bulletin de victoire : " Je traverse le village. " ler objectif enlev← superbement; " 2ᄚ objectif, idem; " Le troisi│me le sera dans quatre minutes. " Allonger le tir. " En effet, le mouvement s’ex←cute avec une rapidit← prodigieuse. Le combat se livre maison par maison ¢ coups de grenades; les Allemands, retranch←s dans des r←duits, se d←fendent jusqu’¢ la mort. Un capitaine, cern←, se brle la cervelle au moment o il allait ↑tre pris. Un grand nombre de soldats sont cueillis dans les caves et, parmi ces soldats, beaucoup sont ivres. Pour se donner du cワur ils ont vid← les bouteilles abandonn←es par la population civile, ←vacu←e quelques jours avant. A 19 h. 30, tous les ←l←ments du bataillon tiennent la lisi│re Est du village. Les prisonniers arrivent de tous ct←s. Poursuivis par nos fusils mitrailleurs, des groupes courent en d←sordre vers le Sud-Est et disparaissent. Comme la lune se l│ve sur le champ de bataille, des soldats franais, dans la joie du succ│s, s’embrassent et dansent sur la place de l’Eglise et par les rues, tandis que les feux de Bengale des vainqueurs jettent au ciel pour le communiqu← du lendemain le nom de Bouchavesnes reconquis.
Un des officiers du 44eme d’infanterie, dont le rle ne fut pas le moindre, notait ainsi ses impressions en d←barquant dans la Somme: " Nous avons quitt← les sombres sapins et les hautes vall←es de l’Alsace, fra○che oasis dans le d←sert de l’immense champ de bataille. O nous conduit le train qui nous emm│ne, interminable ? A Verdun, disent les gens bien inform←s (il y en a toujours). Verdun! Nous sortons d’en prendre!.. Dans la Somme, il n’y a pas de doute, disent les autres… Et les commentaires vont leur train. Amiens! Le sort en est jet←. C’est bien la Somme. Tant mieux! Cela marche l¢-bas. C’est la belle guerre, ¢ la franaise, le mouvement, l’offensive. Quelques ←tapes. Quelques jours de stationnement dans les villages ou dans des camps. Et notre tour arrive. Le 7eme corps rel│ve le 20eme. Mon r←giment est ¢ l’avant-garde de la division. C’est un beau r←giment. Les grands chefs l’admirent, et nous le disent. Pendant cette guerre, il a donn← partout, inlassablement, superbement. Mulhouse, Altkirch, la Marne, l’Aisne, la Champagne, deux fois Verdun, sont inscrits sur son fanion en lettres d’or et de sang. Il s’y ajoutera la Somme. A sa t↑te, un chef d’←lite. Les officiers le respectent, l’admirent, l’aiment et le suivront partout. Ses soldats ont un culte pour lui. Sa troupe est en majeure partie compos←e de recrues de la classe 1916. Ardeur et enthousiasme de la jeunesse, encadr←e par de solides v←t←rans et des sous-officiers de carri│re ou ←prouv←s. On les aura, les Boches! Ils les ont eus. D’abord ce fut au bois de Hem, le 11 aot. Le bois de Hem! Qui ne l’a pas vu n’imaginera jamais ce qu’y fut la guerre. Une vision d’enfer. Dans le cr←puscule, ¢ la lueur fantastique et blafarde des canons et des fus←es ←clairantes, on distinguait des poteaux d←chiquet←s, les squelettes mutil←s des arbres. Un sol crev← de trous d’obus, parsem← de d←bris, armes, ←quipements, cadavres. On tr←buchait presque ¢ chaque pas; on croyait heurter un tronc d’arbre et on marchait sur un lambeau qui avait ←t← un homme. Un souffle de charnier vous prenait, s’attachait ¢ vous et vous impr←gnait encore loin du champ de mort o il vous avait saisi aux entrailles. L¢, les Allemands avaient laiss← des bataillons et c’est l¢ que, pour la premi│re fois dans la Somme, ceux qui devaient prendre Bouchavesnes connurent le succ│s.
" Bouchavesnes! La bataille du 12 septembre, une des plus brillantes et des plus f←condes qu’ait livr←es l’arm←e du g←n←ral Fayolle, est domin←e par le nom de ce village picard emport← au soir d’une journ←e de gloire." Ainsi s’exprimait un r←cit officiel publi← par la presse dans les derniers jours d’octobre. La prise de Bouchavesnes fut, en effet, un couronnement. Une attaque lanc←e ¢ midi 30 par un radieux soleil, sous la plus formidable canonnade qui se puisse entendre, dans l’enthousiasme des succ│s pass←s et de la victoire promise, les premiers objectifs atteints et d←pass←s sur tout le front en quelques minutes; les gars du Nord d←bordant Combles par le Sud-Est, les zouaves et les troupes d’Afrique aux lisi│res de Rancourt, les puissantes d←fenses du bois Marri│res enlev←es par les chasseurs et les fantassins de la brigade Messimy, la grand’-route de Bapaume quasi atteinte, le bois des Berlingots pris, les acc│s Est de Cl←ry d←blay←s par les r←giments du 33eme corps, des prisonniers par centaines, tel ←tait ¢ 5 heures du soir le r←sultat de la bataille. A 6 heures, on annonait dans les postes de commandement que les fantassins ←taient au contact de la route, que Bouchavesnes allait ↑tre attaqu←. A 8 heures, les flammes de Bengale brlant comme autant de feux de joie aux carrefours et aux lisi│res annonaient que le village ←tait aux Franais… On raconte qu’en apprenant la prise de Bouchavesnes, le g←n←ral en chef, qui avait assist← ¢ la bataille, demanda: " Qui a fait cela’l " Et, dans l’incertitude du d←tail, ¢ un moment o les liaisons t←l←phoniques avec l’avant sont coup←es par la mitraille ou n’existent pas encore, quand de rares coureurs franchissant les barrages apportent au prix de quelles peines les premiers renseignements et que seuls des signaux donnent aux observateurs l’indication de la ligne atteinte, on lui r←pondit seulement par le nom du commandant des troupes d’attaque. Aujourd’hui, ceux qui ont pris Bouchavesnes sont connus. Des r←cits officiels ont indiqu← les r←giments et les noms des chefs; Dans le recul suffisant du temps, l’affaire peut ↑tre reconstitu←e et revivre. Ceux qui en furent les acteurs ou les t←moins peuvent parler et, si nous y revenons, c’est qu’ayant v←cu cette bataille du 12 septembre, " une des plus brillantes et des plus f←condes" qu’ait livr←es l’arm←e de la Somme, nous pouvons en donner le d←tail aux lecteurs de L’Illustration
Le 12 septembre, en face de Bouchavesnes, c’est le colonel Messimy, dont la brigade de chasseurs est rattach←e elle-m↑me ¢ une division aux ordres du 7eme corps d’arm←e, qui commande les troupes d’attaque. D←j¢, il a enlev← le bois Reinette, o il a fait un important butin et, dans cette journ←e du 12 septembre, il a atteint tous ses objectifs: la tranch←e des Marri│res, les lisi│res Est du bois des Aiguilles et du bois Marri│res, la cr↑te ¢ l’Est des m↑mes bois. A 17 h. 30, la situation de ses troupes d’assaut est la suivante : dans le secteur de gauche, les 6eme, 27eme et 28eme bataillons de chasseurs (aux ordres du colonel Carlier) sont devant la route au Nord-Ouest de Bouchavesnes; dans le secteur de droite, un bataillon du 133eme r←giment d’infan- terie et le 2eme bataillon du 44eme d’infanterie (aux ordres du lieutenant-colonel Baudrand, du 133eme) sont ←tablis au contact de la route face au village. En r←serve de division : un bataillon du 133eme et le ler bataillon du 44eme (voir croquis). Depuis la veille, le colonel Messimy parle de la bataille de Bouchavesnes. Il a la sensation qu’il prendra le village et portera ainsi les positions 3 kilom│tres plus avant. Il ne se trompe pas. Le lieutenant-colonel Nieger, commandant le 44eme r←giment d’infanterie, a ←t← mand← ¢ 15 heures ¢ P. C. Messimy. Il a reu le commandement des r←serves de division et, ¢ 16 h. 30, un ordre d’attaque sur Bouchavesnes avec deux bataillons. Aussitt les dispositions sont prises. Le bataillon Thouzelier, du 133eme, attaquera le village en le d←bordant par le Nord; le bataillon de P←lacot, du 44eme, l’attaquera de front entre Brioche et le cimeti│re. Trois objectifs successifs: la route de B←thune ¢ P←ronne, la grande tranch←e aux lisi│res Ouest du village, les lisi│res Est du village. Liaison ¢ gauche du bataillon du 133eme avec le 28eme bataillon de chasseurs; liaison ¢ droite avec le bataillon Martin, du 133eme, qui attaquera le secteur Sud. C’est ¢ 17 h. 30 que les troupes reoivent l’ordre d’attaque; A 17 h. 45, elles se mettent en marche; ¢ 18 h. 30, elles ont pris la formation d’attaque. Dix minutes apr│s, elles s’←lancent. C’est ce qu’un officier appela " l’ordre d’attaque coup de foudre ". Le succ│s ne fut pas moins rapide. Tel fut le programme, tels furent les ex←cutants, et ceux-l¢, il les faut mieux conna○tre.