Enfants bilingues

Juste pour raconter une petite anecdote qui m’a beaucoup amusé.
Mes enfants et petits enfants étaient chez nous pour Noël. Ils sont tous , parents et enfants bilingues et binationaux US - France.
Le jour de la distribution des cadeaux…des petits écrans avec des personnages agités qui courent dans tous les sens , font bip bip bip , bling bling bling , tut tut tut , comme il se doit.
Je m’assieds sur le canapé à côté du deuxième de la meute ( 5 ans et demi) , plongé dans son jeu et…je lui pose une question en anglais. Sans quitter son écran des yeux , il me répond instantanément en anglais.
Une demi-seconde après m’avoir répondu , il quitte son écran des yeux , se tourne vers moi et me dit : « tu sais , pépé , tu peux me parler en français ! » J’ai trouvé cette réflexion très mignonne. :smiley:
Les gamins fréquentent une école bilingue (qui coûte d’ailleurs la peau des fesses à leurs parents ) et sont habitués à passer d’une langue à l’autre sans difficulté.
En en discutant avec ma fille , elle me disait que la faculté d’adaptation des gamins est absolument incroyable ; ils savent spontanément à qui il faut s’adresser dans quelle langue !

Oui, et beaucoup de parents se méprennent sur la faculté d’adaptation des enfants. C’est ainsi qu’en Alsace, beaucoup de parents ne parlaient plus que le français à leurs enfants, de peur qu’ils ne s’emmêlent les pinceaux avec l’école s’ils continuaient de parler le dialecte à la maison, et de passer pour des incultes et des cancres (c’est chic de parler français). Personnellement, j’ai toujours su faire la part des choses, et l’école était l’école, la maison la maison.
Par contre, quand mon fils venait en France, mes parents s’étaient mis d’accord pour ne parler que français avec lui, et la correspondance se faisait aussi en français, histoire de marquer le coup : il y avait les grands-parents maternels de langue allemande, et les grands-parents parternels de langue française. Les choses étaient claires. Ainsi conditionné, mon fils a passé sans aucun problème de langue son année Erasmus en France.
A noter que mon fils, obligatoirement bilingue allemand/italien, parle et écrit couramment cinq langues, dont le français.

Le bilinguisme naturel c’est une chance énorme, lorsque celui-ci est réussi,comme dans les deux exemples cités ci-dessus. Réussite souvent due à des parents très impliqués, ce qui n’est pas rare, chez ceux ayant un métier en rapport avec les langues étrangères.

Hélas ce n’est pas toujours le cas.

J’ai connu quelqu’un qui parlait bien l’anglais pour un Français et bien le français pour un « Anglais », sans réellement maîtriser ces deux langues. Écossais par son père et Français par sa mère il a dû quitter l’école à 14 ans pour travailler, comme ses parents l’avaient fait avant lui.

Mais après tout, « bien » ce n’est déjà pas si mal, quand on pense au nombre d’illetrés. Nombre en augmentation en France, même si l’école est obligatoire jusqu’à 16 ans depuis bien longtemps.

Vous pouvez être fiers de vos descendances si multiculturelles, michelmau et Andergassen!
Mes parents ne m’ont pas appris leur langue maternelle, sûrement parce qu’elle ne m’aurait servi à rien (langue parlée par une minorité ethnique). Cela ne fait que depuis quelques mois que je me rends compte du gâchis que cela a pu être de ne pas me l’avoir appris…

Il y a aussi les enfants qui se mêlent un peu plus les pinceaux. La cadette de la famille chez qui une amie au-pair travaillait, est franco-allemande: elle n’avait même pas 3 ans et commençait souvent une phrase en allemand pour la finir en français. Ses frères aînés eux, étaient parfaitement bilingues. Ils parlaient français avec moi: peut être associaient-ils un visage avec une langue?

Tu as raison de le souligner, Val. En tant que linguistes, nous avons tendance à viser la perfection (et c’est clair que je le ferai pour mes enfants !), mais il faut bien avouer que même un faux-bilingue parlera toujours pas plus mal qu’au moins la moitié de la population monolingue, alors le mal n’est pas si grand… En fait, c’est peut-être plus au niveau de l’identité que c’est plus difficile.

Tout à fait d’accord. Et puis, ça dépend aussi de si la personne a de la volonté ou pas…
J’aurais bien aimé être bilingue dès l’enfance :smiley: J’essaierai peut-être avec mes enfants un jour, qui sait?

Ce qui m’a amusé , dans cette petite expérience , c’est qu’en m’adressant à mon petit-fils en anglais , j’avais brisé un code tacite selon lequel , comme le mentionne Andergassen dans son post , quand on est chez les parents de maman , la conversation se déroule naturellement en français , par contre , chez les parents de papa , aux USA , c’est l’anglais qui est de mise…et ils savent pourtant que les grands-parents français parlent et comprennent l’anglais…et les grands-parents US , le français. :smiley:

A cette rubrique sur le bilinguisme, riche en témoignages vécus j’aimerais en apporter un plus positif que le précédent.

Mon amie japonaise vivait en France depuis plus de 14 ans où elle était professeur de japonais à l’université d’Aix Marseille. Son époux est allemand et se prénomme Yves (comme mon mari :laughing: ). Ils ont deux petits garçons maitrisant parfaitement le japonais, l’allemand et le français. La père ne parlant pas le japonais et la mère ne parlant pas l’allemand, ils se parlaient en français entre eux. Par contre pour parler à leurs enfants ils utilisent leur langue respective. Le problème est que le père, râle tout le temps après les enfants, même s’il aboie beaucoup mais ne mord jamais, contrairement à la mère qui a une voix douce.
Associer le japonais à la douceur c’est bien, mais l’allemand aux ordres aboyés c’est pas terrible. On en a parlé tous trois et en avons bien ri. Depuis peu ils ont quitté Aix pour s’installer à Tokyo. Je ne sais pas ce qu’il restera du français des deux garçons, sans doute sera-t-il toujours excellent, car la maman enseigne à présent le français dans une université là-bas.

Je suis persuadé qu’on oublie rien d’une langue qu’on a pratiquée étant jeune. Ca reste enfoui quelque part dans un coin du cerveau et ne demande qu’à être réactualisé le moment venu.

Oui, même chose avec mon neveu (10 ans) et ma nièce (6 ans) qui vivent à Paris. Ma nièce s’adresse à moi presque uniquement en allemand - même si elle devrait savoir que je comprends aussi le francais et qu’elle a encore de grosses difficultés de s’exprimer en allemand. Ma belle-soeur lui parle presque toujours en allemand (mais pas tout systématiquement) ; ma nièce a un vocabulaire pas si mal que cela en allemand mais la grammaire reste assez rudimentaire (presque pas de déclinaisons …). Néanmoins, c’est un avantage pour les deux de grandir avec les deux langues. Mon neveu, très ambitieux lui, se débrouille beaucoup mieux en allemand qu’elle, même à l’âge de 6 ans (il en a 10 maintenant), ce fut déjà plus fluide. Mais chaque enfant est différent …

J’adore les fautes d’allemand que font les deux, c’est souvent trop mignon. Par exemple, lors d’une randonnée en forêt : « Nein, ich glaube, das ist der schlechte Weg. » (au lieu de « der falsche Weg ») ou bien ce « Wie heißt das schon? » (au lieu de « Wie heißt das noch mal? ») … et tout ceci avec cet accent francais si craquant. :smiley: J’adore.

et c’est là que l’on voit la faculté d’adaptation d’un enfant… qui sait automatiquement que chez Papi X il parle telle langue, et que chez papi Y il parle une autre langue… de la même façon qu’ils n’oublient pas que chez Papi X on ne met pas les pieds sur le canapé, et que chez Papi Y on peut le faire … :laughing:

quelle chances ils ont de grandir dans un bain bilingue… cela leur permet de s’ouvrir à d’autres cultures, d’autres coutumes, d’autres modes de vie, une autre alimentation aussi, la découverte d’autres saveurs, d’autres mets… c’est un véritable enrichissement supplémentaire pour ces enfants nés de couples de deux nationalités différentes !qu’ils en profitent !!!

On a encore pas mal d’inepties sur le sujet dans le crâne des parents et de certains intervenants scolaires… le mépris pour la langue familiale des immigrants me révoltera toujours. Surtout que toutes les langues ne sont pas à la même enseigne dans les cours d’école : un mot de turc et on vous fusille du regard, un mot d’anglais et on vous invite pour les vacances. A Lörrach, c’est plutôt le russe qu’on entend, d’ailleurs :smiley:

Peut-être te parle-t-elle en allemand parce c’est tout simplement la langue qu’elle préfère, même si elle ne maitrise pas aussi bien cette langue que le français. Une affirmation de sa personnalité linguistique qui se réveillerait ??
Ceci dit, le code-switching est une attitude tout à fait normale lorsque l’on est élevé dans deux langues voir même trois différentes.
Pour être honnête, je ne crois pas du tout au parfait bilinguisme. Déjà parce que je connais très peu de personnes qui connaissent leur langue d’usage dans toute sa sensibilité et sa profondeur. Langue d’usage que l’on qualifie parfois à tort de maternelle.
Je terminerais en avouant que je raffole aussi de l’accent allemand, tellement qu’il m’arrive souvent lorsque je parle français avec un ami germanophone natif de prendre inconsciemment son accent :frowning: :frowning: :frowning: . Heureusement ils me connaissent et ça les fait rire ainsi que mon mari d’ailleurs !!!

Je ne crois pas que des enfants aussi jeunes aient une préférence pour telle ou telle langue en soi. Ils en ont bien, une préférence, mais c’est toujours la langue qui les entoure le plus souvent. Les enfants sont maîtres dans l’adaptation et préfèrent ce qu’ils entendent au quotidien.

Ma nièce préfère nettement le français. Il y a deux ans encore, elle a même eu une sorte de peur de l’allemand ; chaque fois que quelqu’un d’Allemagne voulait lui parler au téléphone, elle s’enfuiait. :wink: Pendant les deux dernières années, elle a fait quand même beaucoup de progrès en allemand et, au fur et à mesure, a pris confiance en elle. Maintenant elle sait qu’elle arrive à se faire comprendre en allemand même si cela reste plus dûr pour elle.

Nous, mon mari et moi, elle nous met probablement dans la catégorie « Allemagne », donc, il faut s’adresser à nous en allemand.

D’où le rôle génial que ton mari et toi avez indirectement: celui de faire comprendre à cette petite fille que l’allemand c’est aussi la langue de la douceur !!! Chose que Yves, le mari allemand de mon amie japonaise Hisae n’a pas encore tout à fait saisi…

Dans quelle mesure ?

Pour montrer que l’allemand est aussi la langue de la douceur et qu’il ne faut pas avoir peur de parler allemand.
Chez mes amis japonais-allemands dont la femme est parfaitement francophone, seul le mari allemand gronde les enfants très fort. Et il le fait toujours en allemand, jamais en français. Par contre Hisae parle avec douceur aux enfants en français ou en japonais même si elle doit les gronder.

Yves gronde ses enfants en allemand ou crie de joie avec eux lors de match de football.
De cette sorte la langue allemande devient l’empreinte d’une virilité très forte et n’a plus aucun lien avec la douceur… Et je le déplore. Quand j’étais chez eux, je lisais toujours des histoires en allemand aux enfants… Ce que parents et enfants appréciaient et encore plus à cause de mon petit accent français et ma couleur de peau.

A la télévision française nationale, je n’entends que trop souvent des clichés sur la soit disant dureté ou bruit de bottes de la langue allemande même véhiculés par Nagui, un présentateur que pourtant j’aime bien.

Cela me fait très mal!!!

Voilà ma réponse finale aprés un édit

Elle a pas eu de chance, le seul Allemand qui crie après ses gosses. Ou alors il a été banni d’Allemagne pour maltraitance auditivo-psychologique sur mineur. Ils ne leur en faut pas beaucoup pour dénoncer l’éducation trop musclée.