Tout à fait d’accord avec Elie sur ce point. Je me souviens d’un copain allemand en fac, qui avait précisément évoqué cette impression d’en être arrivé à un palier où il avait le sentiment de piétiner.Il avait très vite assimilé énormément de choses, y-compris l’argot, et parlait le français avec beaucoup d’aisance…! Rien d’anormal.
Ce sont des moments très pénibles. Je l’ai vécu vers ma troisième année à Kiev. Au moment où on croit maîtriser une langue étrangère, on découvre tout à coup tout ce qu’on ne sait pas. C’est un cap à passer.
J’adopte un ton détaché parce que j’ai vécu cela avec trois langues. Mais c’est en effet très frustrant, je confirme.
Il faut persévérer. Y compris en francais, d’ailleurs, car une langue, toute maternelle qu’elle soit, se travaille. Sinon, les germanismes et autres tics de langage se cristalise… et ce n’est pas vraiment ce que l’on veut retrouver chez un prof de langue.
Je suis un peu beaucoup dans le meme cas, et ca commence serieusement a me peser…
L’annee d’immersion dont parle Elie, je viens de la passer - Avec presque exclusivement que des Allemands, et je sens que je pietine… que je ne serai jamais parfaite, en bref, que je ne peux pas aller plus loin, comme si j’etais arrivee a mes limites.
C’est vrai que je ne me destine pas aux metiers de l’enseignement, plutot a la traduction, mais bon c’etait juste pour faire part de mon ras le bol. Peut etre que tout se passe sans qu’on le sache, qu’en fait on ne pietine pas du tout, mais bon, j’y crois pas trop…
Grande question. Je dois dire qu’avec un an d’immersion, on fait toujours des progrès, même si cela consiste ironiquement en une plus grande conscience de ses fautes. Avant, on parle sans savoir à quel point la situation est grave, au bout d’un an, on n’arrive toujours pas à parler correctement, mais l’oreille a fait des progrès considérables. Et c’est là que l’on peut commencer à travailler les détails, on sait à quoi faire attention, on ne réfléchit plus dans le vide, on tatonne, certes, mais on sait où on est.
Un type perdu à qui on donne une carte est toujours perdu… mais il a une carte.
Ah jeunesse!
Ne te désole pas, Dresden, tu n’as pas fini d’en voir! Des crises de ras-le-bol, tu en auras « noch und nocher »! Tu auras aussi des instants d’intense jubilation, rassure-toi! Tout comme la spéléologie, les langues sont un domaine d’exploration inépuisable dont on ne voit jamais la fin. Il est donc illusoire de se fixer un cap à atteindre dans les délais les plus brefs, mais c’est un défaut inhérent à la jeunesse avide de progresser, et donc bien pardonnable.
Il m’a fallu attendre la quarantaine pour comprendre que mon niveau de connaissances n’était pas une fin en soi, que par rapport à la somme universelle des connaissances, mon savoir ne représentait qu’une quantité infinitésimale, et que plus j’avançais, plus l’horizon se reculait. Travailler avec Internet a été pour moi une véritable révélation, dure à admettre au début, que le niveau de connaissances acquises au cours de la scolarité et des études universitaires n’était que roupie de sansonnet; mais aussi la révélation que j’avais en main un véritable bâton de pèlerin, me mettant en mesure de répondre à l’appel « lève-toi et marche », et de m’introduire dans des domaines qui étaient restés jusqu’alors hermétiquement clos pour moi. Quel monde merveilleux se révélait à moi! Quel enrichissement quotidien!
Une langue est en constante évolution, il faut marcher, et surtout ne pas s’arrêter. Evolution qui ne va d’ailleurs pas que dans un sens (je pense en premier lieu à l’influence anglo-saxonne), mais qui, comme la mode d’ailleurs, marque des retours surprenants, tels que la découverte, dernièrement, du terme « präferiert » que n’aurait pas désavoué Frédéric II.
Tout comme la spéléologie, les langues sont un domaine d’exploration inépuisable dont on ne voit jamais la fin.
Absolument d’accord. Quand on voit ce qu’on sait, en comparaison avec tout ce qu’on ignore encore, les linguistes devraient être les gens les plus modestes au monde.
En tout cas, j’ai trouvé les cours de langue francaise à l’étranger très instructif même si l’intérêt pour moi était bien différent que pour les étudiants étrangers. J’en ai beaucoup appris sur le comment du pourquoi de ce qui me paraissait avant tout simplement… évident. Et j’ai aussi corrigé certaines de mes fautes ou pris conscience de mes régionalismes. C’est déjà beaucoup. Pas du temps perdu, en tout cas. Je vous le recommande.
Tout d’abord merci pour toutes ces reponses qui me consolent un peu!
Grande question. Je dois dire qu’avec un an d’immersion, on fait toujours des progrès, même si cela consiste ironiquement en une plus grande conscience de ses fautes…
C’est vrai que cette annee m’a fait prendre conscience de mes points faibles (fautes de declinaisons a l’oral, vocabulaire parfois tres restreint) mais c’est comme quand on commence a escalader une montagne, ca parait trop gros et infranchissable! Il n’y a pas de secrets, pour changer tout ca, il faut que je pratique.
Il m’a fallu attendre la quarantaine pour comprendre que mon niveau de connaissances n’était pas une fin en soi, que par rapport à la somme universelle des connaissances, mon savoir ne représentait qu’une quantité infinitésimale, et que plus j’avançais, plus l’horizon se reculait.
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mais aussi la révélation que j’avais en main un véritable bâton de pèlerin, me mettant en mesure de répondre à l’appel « lève-toi et marche », et de m’introduire dans des domaines qui étaient restés jusqu’alors hermétiquement clos pour moi. Quel monde merveilleux se révélait à moi! Quel enrichissement quotidien!
Eh bien tu vois, ca a plutot tendance a me decourager Je n’avais pas vraiment realise qu’apprendre une langue demande beaucoup de patience, car j’ai assimile les bases de la langue tellement vite (ca me passionnait tellement) que, maintenant que le rythme est plus lent, je me rends compte des limites.
Lire vos messages m’ont egalement fait prendre conscience de ce qui a change, mon niveau est quand meme meilleur (j’ai lu ce que j’ecrivais en allemand y’a un an, mes fautes me sont sautees aux yeux), je crois que la patience est vraiment la cle, je vois rien d’autre.
Puis concernant le FLE, j’ai fait des cours de traduction destines aux Allemands ou on faisait souvent de la grammaire et il m’est arrive exactement la meme chose, j’ai decouvert pourquoi on disait telle chose (et non parce que c’est comme ca et voila) et ai egalement pris conscience a quel point mon francais est nul ON croit tous avoir un bon niveau parce que c’est notre langue maternelle mais quand il s’agit de l’expliquer, y’a plus personne.
Bien sûr, je suis d’accord avec ce qui a été dit par mes vénérables collègues
Après, j’ai envie d’ajouter quelque chose qui va peut-être en faire hurler plus d’un, mais qui pourra peut-être aussi te rassurer, Dresden : on n’est pas non plus obligé d’apprendre une langue parfaitement. Je suis immensément admirative du niveau d’un Elie ou d’un Andergassen, mais dans mon cas, j’en suis très loin… et ça me va parfaitement. Car les efforts à faire pour atteindre un tel niveau sont trop grands par rapport au bénéfice que je peux en retirer. J’ai déjà un niveau qui permet à tous mes amis allemands de dire « ouah elle parle trop bien Sonka », de discuter sans problème de tout ce que je veux (même s’il me manque des mots j’ai toujours une périphrase à portée de main) et d’utiliser l’allemand dans ma vie professionnelle, et ça suffit largement à mon bonheur. Si j’étais interprète ou prof dans la situation d’Elie, en effet, il vaudrait mieux que je m’améliore, mais dans mon cas précis je ne vois pas ce que ça m’apporterait, en dehors de la satisfaction de me faire passer pour une Allemande ou ce genre de chose. Bref, ma philosophie : ne pas se stresser outre mesure, ça doit aussi rester un plaisir.