Goethe était-il bi-?

Retrouvé dans les « Epigramme-Venedig 1790 » ces deux vers:

« Knaben liebt ich wohl auch,doch lieber sind mir die Mädchen;
Hab ich als Mädchen sie satt,dient sie als Knabe mir noch. »

Qu’en pensez-vous? :wink:

Ces deux vers ne le laissent-ils pas entendre,ou alors,ai-je l’esprit mal tourné?(Ce qui n’est pas à exclure.)

Pourquoi pas, mais je ne trouve pas le deuxième vers très clair… Quel sie ? Et comment ça « dient » ?

Personnellement,ça ne me dérange pas;au contraire,j’aurais tendance à avoir plus de sympathie pour ce Goethe,que pour le Herr Geheimrat.

J’avais entendu ces deux vers sur 3Sat il y a qques années;une fois par jour,un acteur disait des vers du patrimoine alld.Et il y a qques jours,en parcourant un bouquin,je suis retombé sur ces deux vers et ça a fait tilt.C’est vrai que ce Zweizeiler n’est pas clair à 100%,mais je me souviens encore du sourire de connivence de l’acteur.Peut-êtrequelqu’un pourrat-il nous éclairer! :wink:

Euh, moi non plus ! Ma question était purement grammaticale…

Il y a confusion des pronoms dans cette phrase, Sonka a raison. On a l’impression que Goethe dit sie pour Mädchen meme au singulier. C’est une habitude courante mais est-ce que Goethe aussi le faisait, je ne sais pas.

Ceci dit, la notion moderne de bisexualité est complètement incongrue pour l’époque de Goethe. La réalisation de l’acte sexuel n’était à l’époque pas la base d’une définition de l’identité sexuelle. L’identité sociale liée à la vie affective homosexuelle est très moderne. Avant la révolution sexuelle, la répression sociale par l’ensemble de la « masse » sociale était telle qu’il ne pouvait pas y avoir la moindre expression d’une identité sexuelle. L’acte sexuel était isolé de l’identité sociale. Cela était en partie aussi le cas pour le mariage, où le couple n’était pas socialement identifié à leur lien amoureux. Le mariage était une identité sociale en soi, indépendemment de ce que l’on en faisait.

Ce lien semblerait confirmer que le dernier « sie » remplace bien « Mädchen »:

Sans doute. Surtout dans un contexte tellement peu « neutre ». :wink:

J’aime d’ailleurs bien ce glissement (grammatical) du premier « sie » au pluriel, neutre - après « die Mädchen » - au deuxième « sie » au singulier, fem. qui reste, c’est vrai, surprenant (et strictement parlant « faux »). Mais l’effet que ça donne: après coup, le premier « sie » devient lui-même ambigue: ayant identifié le dernier comme singulier fem, on se demande, n’était-ce pas déja le cas pour le premier.
Par contre au niveau sens, ton lien, michelmau, fait une lecture très peu poétique de notre Goethe: « Knaben, Mädchen »: objets sexuels interchangeables (faisant allusion assez directe à la penetration anale)… ceci dit, le sens deviendrait clair comme ça. toute autre interpretation est moins évidente, il est vrai…

Pour approfondir notre discussion érudite: le singulier « dient » est du au Versmass - le Hexameter - d’après le modèle que Goethe choisit, à savoir les epigrammes antiques (souvent très explicites elles aussi).

Knaben liebt ich wohl auch, doch lieber sind mir die Mädchen;
Hab ich als Mädchen sie satt// dient sie als Knabe mir noch.

Ses epigrammes sont vraiment bourrées de phrases explicites et rudes. Plus loin dans les mêmes Venetianische Epigramme (avec Römische Elegien - « Erotica Romana »), Goethe écrit:

Alle Weiber sind Ware, mehr oder weniger kostet
Sie den begierigen Mann, der sich zum Handel entschliesst.
(…)

ou

Gib mir statt « Der Sch(wanz) » ein ander Wort, o Priapus,
Denn ich Deutscher, ich bin übel als Dichter geplagt.
Griechisch nennt ich dich phallos das klänge doch prächtig den Ohren,
Und lateinisch ist auch mentula leidlich ein Wort.
Mentula käme von mens, der Sch … ist etwas von hinten,
Und nach hinten war mir niemals ein froher Genuß.

Il parait, Goethe himself avait autocensuré une partie avant publication, ses éditeurs une autre en plus.

Eh bé, je le savais pas comme ça ce bon vieux Johann Wolfgang ! :laughing:

Comme quoi il faut toujours se méfier des apparences! :laughing:

Et lire attentivement tes sujets, michelmau! On apprend beaucoup! :laughing: