Je me souviendrai toujours de sa philosophie de la vie, malgré tout ce qu’il avait vécu, et qu’il racontait
sans cesse, pour faire comprendre aux collégiens, et lycéens, que les camps de concentration n’étaient pas
une imagination, mais un fait réel…
Cette philosophie qui lui faisait dire « je n’ai pas peur de la mort, j’en ai vu tellement qui sont partis avant moi », avec
ce voile sur ses yeux qui passait lentement, comme s’il revoyait en boucle ces cruelles images… et les cauchemars
qui ne le quittaient pas… et avec lesquels il vivait… au quotidien…
Je garde précieusement en souvenir cette petite dédicace sur un livre « leçons de ténèbres » de la FNDIR-UNADIR… que vous
avez bien voulu me dédicacer il y a presque 10 ans…
Des rencontres comme ça… on n’en fait qu’une dans la vie…
Tout mon respect pour ce grand monsieur.
Après la fin de la guerre , une bonne partie de ceux qui avaient traversé l’épreuve des camps de concentration se taisaient ; ils n’avaient pas envie d’en parler…souvent par crainte de n’être pas crus. Et c’est souvent sous la pression de leur entourage et de leurs enfants qu’ils se sont décidés à témoigner.
Pour moi , il y a la génération qui a vécu les horreurs directement , celle de ceux qui ont reçu leur témoignage ( dont je fais partie) et celle pour qui c’est de l’histoire telle qu’elle figure dans les livres.
J’ai connu une dame , encore vivante aujourd’hui , qui avait été internée à Ravensbruck et qui racontait qu’elle n’avait survécu à cet enfer que parce que sa belle-mère s’était privée de nourriture afin que sa belle-fille survive et puisse témoigner.Elle allait dans les écoles et parlait de son expérience ; je me souviens que , gamin , j’avais été frappé par son matricule tatoué sur le bras.Je m’étais alors juré , en souvenir d’elle , de ne jamais me faire tatouer.
Que monsieur Joly repose en paix.
ah le matricule tatoué… J’ai frémis la première fois que je l’ai vu…
j’en ai vu un autre depuis, sur une petite dame en maison de retraite… Les jeunes aides-soignantes avaient eu le culot de
se demander ce que c’était que ce tatouage sur le bras… là aussi… j’ai frémis… de honte…
tu as tout compris Michelmau… c’est un témoignage vivant qui s’en est allé…
Quelle merveilleuse idée de rendre hommage à M. René Joly, récemment décédé: un jeune homme déporté pour son engagement dans la résistance,
c’est bien aussi que son fils Alain continue à transmettre les témoignages des survivants.
Un grand monsieur effectivement, d’une jeunesse éclatante pour ses 90 printemps et plus.
Une chose que je note, il a reçu un soutien discret d’un civil allemand, resté anonyme.
Ma grand-mère maternelle a été déportée à Ravensbrück, le camp des femmes. Elle n’était pas résistante mais faisait du marché noir. Elle a été arrêtée par dénonciation française due à la jalousie. Elle a été envoyée d’abord en forteresse, puis ensuite ayant vu de la propagande odieusement mensongère sur les camps, les prisonnières se sont révoltées pour partir là-bas.
Ma grand-mère n’est pas morte là-bas malgré la dureté de son existence là-bas… Certes elle n’aurait pas dû se trouver là.
Par contre à la libération, elle n’a dû sa survie qu’au fait que les gens lui aient donné peu à manger malgré son extrême maigreur et ainsi lui permettre de se réhabituer à manger normalement.
Ma grand-mère n’a jamais parlé de ce qu’elle avait vécu là-bas… Par contre, le tatouage de son matricule je l’ai encore en mémoire.
Je n’ai que 52 ans mais je dois dire que cette Seconde Guerre mondiale, avec un papa, 90 ans qui a pris le maquis, une grand-mère déportée…a toujours été présente dans ma vie, sans parler de Nacht und Nebel que j’ai vu à l’âge de 11 ans… Cela ne raisonnait pas seulement comme un film sur l’horreur et la barbarie mais aussi sur le vécu de ma grand-mère.
C’est peut-être pour cela que ma famille, ma grand mère aussi, de son vécu ,nous a toujours encouragés mon frère et moi, à avoir des amis allemands de notre âge, à apprendre la langue et la culture et aussi et surtout à ni oublier ni déformer les horreurs perpétrées par les nazis allemands ou leurs complices de tout pays.
Hélas Sonka, elles se sont révoltées parce qu’à cause de la propagande diffusée, elles croyaient qu’elles seraient mieux traitées.
Dans le Nord de la France - Lomme, plus exactement, les mineurs (la famille de ma maman) crevaient de faim… Alors facile d’imaginer les jalousies que la vente au marché noir peut engendrer, et l’effet que peut avoir la propagande sur ces petites gens n’ayant jamais eu accès à l’instruction.
Bon pour des gens qui n’auraient pas compris et me connaissent bien sur ce site,
je rajoute que je suis une enfant noire née en France métropolitaine, adoptée à l’âge de 3 mois.
J’aurais aimé pouvoir écouter le témoignage de cet homme, même de n’importe quelle personne qui a connu ces horreurs car j’ai toujours eu beaucoup de mal à me dire que tout ce que j’ai appris en cours d’histoire et vu dans mon manuel est vraie, que ça s’est réellement passé…
Je veux dire, je sais que ça s’est passé mais je n’arrive pas à me l’imaginer. Je n’arrive pas à imaginer quelque chose qui est totalement inhumain et qui me dépasse.
Pourtant, je suis allée dans un camp de concentration pas loin de Berlin, j’ai vu Nacht und Nebel quand j’étais au collège…
Quand je suis allée dans ce camp, je n’ai quasi-rien ressenti parce que je n’arrivais pas à me dire qu’il y a des milliers de personnes qui sont mortes là-dedans… Et je me sens tellement mal de ne rien ressentir…
J’espère que mes propos ne seront pas mal interprétés… et je me demande s’il y a des personnes, peut-être plus de ma génération, dans ce cas-là…
Doreandme, je ne pense pas que tes propos soient mal interprétés ! Ils sont logiques !
Cet homme que j’ai rencontré m’a permis justement de comprendre que tout cela c’était réellement passé…
moi aussi j’ai lu des livres, j’ai vu des films (la Shoah en particulier)… mais quand tu as en face de toi
une personne qui parle de ces lieux, de ces drames, de ces camps, et qui te montre un tatouage… là,
tu tombes de haut… tu dégringoles même…
bref… essaie de voir si dans ton secteur il n’y a pas encore quelques survivants, qui acceptent, comme le faisait
Monsieur Roger JOLY, de parler de ce qu’ils ont vécu… Profites-en… dans 10 ans… ces témoignages là auront
complètement disparus…
Merci Kissou ça me rassure. Oui je vais faire ça, du moins je vais en discuter avec la prof d’allemand du collège dans lequel je travaille car elle en saura d’avantage sur le sujet que moi et les élèves pourront aussi en profiter
D’accord avec Kissou.Difficile d’imaginer l’horreur. Ne t’inquiète pas ; tu n’es pas une personne insensible.
J’habite à une vingtaine de km du camp du Struthof- Natzweiler le seul camp de concentration en Alsace annexée.
J’ai vu et entendu des témoignages d’anciens déportés qui connaissaient les lieux avant l’installation du camps ; ils disaient que cet endroit était magnifique , que les gens venaient faire du ski en hiver et se promener en été. Ils n’auraient jamais pu imaginer que de tels lieux aient pu se transformer en enfer.
Seul le témoignage de ces personnes malheureusement en voie d’extinction, qui ont vécu l’horreur peut nous la rendre palpable.
Doreandme, je vais faire un parallèle avec un autre évènement (parallèle que j’ai déjà fait, soit sur ce forum,
soit ailleurs, si c’est sur ce forum… pardon pour le doublon)…
discussion avec ma nièce de 14 ans sur les évènements du World Trade Center…
il lui est impossible d’imaginer les tours existantes, puis les avions, puis les tours qui tombent et… bien sûr
les jours qui ont suivi…
cela lui est impensable… Elle a vu les images… mais cet évènement lui reste impensable…
et pourtant… il ne date que de presque 14 ans… elle avait 10 mois quand cela s’est passé…
Autant te dire qu’il est logique que tout ce qui concerne la Shoah semble encore impensable à
beaucoup de monde…