Horst Köhler s'inquiète des lois faites à la va-vite

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[i]LE MONDE | 06.07.06

D’importantes réformes restées en suspens en Allemagne, ces dernières années, sur le fédéralisme ou la lutte contre les discriminations, viennent d’être adoptées par une large majorité au Bundestag, la Chambre des députés.

Le Bundesrat, la Chambre des régions, doit permettre à ces textes d’entrer en vigueur, en les approuvant lors de sa séance du vendredi 7 juillet. Les unions démocrates-chrétiennes (CDU-CSU) et les sociaux-démocrates (SPD) se sont aussi entendus, lundi 3 juillet, sur le principe d’une baisse des impôts sur les bénéfices des sociétés de 39 % à 30 % à partir de 2008, un projet déjà dans l’air sous la précédente législature.

La « grande coalition » dirigée par Angela Merkel bénéficie d’une nouvelle configuration : les deux chambres - Bundestag et Bundesrat - ne sont plus de majorité antagoniste ; le gouvernement de Berlin n’est plus opposé à celui des Länder. Cette situation avait empêché les chanceliers Helmut Kohl (CDU) puis Gerhard Schröder (SPD) de mener leurs réformes. La réforme du fédéralisme doit aider à résoudre ce problème durablement, en augmentant les compétences propres des régions mais en réduisant la capacité de blocage du Bundesrat. Ce dernier n’aura son mot à dire que sur un tiers des lois fédérales, contre plus de 60 % actuellement.

Mme Merkel, elle, profite de son alliance avec le SPD pour multiplier les initiatives. L’affectation d’un point de TVA à l’assurance-chômage à partir de 2007 va contribuer à financer la baisse de deux points des cotisations d’assurance-chômage pesant sur les salaires, les ramenant de 6,5 % à 4,5 %. Elle a négocié, lundi 3 juillet, une réforme de la santé, sujet sur lequel les programmes des deux partis sont très éloignés, et qui doit être débattu au Parlement à la rentrée.

L’accord a toutefois suscité une vague de critiques dans les rangs de la coalition et chez les experts. Le président de la République, Horst Köhler (CDU), ancien directeur général du FMI, a déclaré dans un entretien à la Bild Zeitung du 5 juillet que « la solidité » des réformes doit passer avant « la rapidité ». « Les lois faites à la va-vite créent plus de problèmes qu’elles n’en résolvent », a dit M. Köhler. Dans une Allemagne qui rêve de grandes réformes alors qu’elle avance depuis des années par petit pas, il rappelle que, selon la « grande coalition », cet accord sur la santé n’est qu’un « pas intermédiaire vers une grande réforme structurelle ».

HAUSSE DE LA TVA

L’accord est critiqué parce qu’il prévoit, pour colmater un déficit qui risquait d’atteindre 8 milliards d’euros en 2007, une hausse d’un demi-point des cotisations d’assurance-maladie, portées à 14,7 % du salaire. La grande coalition contredit ainsi son objectif d’alléger les charges sur le travail, dont le coût est le plus élevé d’Europe. Elle avait d’abord envisagé un financement de l’assurance-maladie par l’impôt sur le revenu ou par le biais d’une CSG à l’allemande. Ayant décidé d’augmenter de trois points la TVA début 2007, Mme Merkel n’a pas voulu ajouter un impôt supplémentaire et a tranché pour les cotisations.

Horst Köhler critique d’ailleurs implicitement les finalités de cette hausse de la TVA, dont le produit sera affecté aux deux tiers pour combler les déficits budgétaires. Les recettes des hausses d’impôts doivent être employées « principalement au bénéfice des grandes réformes et dépensées pour la refonte du système social et pour des investissements dans la formation et la recherche », dit M. Köhler pour qui les réformes doivent signifier « de façon perceptible quelque chose de meilleur pour les gens ».[/i]