On ne présente plus Jean Ziegler ;homme politique, sociologue , écrivain et polémiste suisse, né à Thun, dans l’Oberland bernois en 1934.
Ziegler est présent à Montreux, au forum de la francophonie, où il défend le français, porteur, selon lui, des espoirs du siècle des Lumières, de la Révolution Française et du rationalisme face à l’anglo-américain porteur selon lui, principalement des principes de l’économie de marché et du capitalisme le plus sauvage.
Il a accordé à la Basler Zeitung, une longue interview dans laquelle il retrace les grandes étapes de sa vie de militant et parle de son engagement pour la francophonie, bien qu’étant germanophone de naissance.
J’extrais de ce texte quelques passages qui nous concernent:
Sur le Berndeutsch:
Interviewer;
( A propos du changement de son prénom de naissance Hans en Jean)
« Le passage de Hans à Jean constituait-il une profession de foi ? »
J.Z:
Bien sûr , je me suis identifié en toute conscience et volontairement à cet univers.Je voulais appartenir à l’espace francophone. Le bernois est une langue magnifique, mais elle n’a pas grand chose à voir avec le monde.Si un intellectuel veut avoir une quelconque influence, ça ne peut pas marcher avec le Berndeutsch.
Interviewer;
« Vous vivez depuis des décennies dans l’aire linguistique francophone et pourtant votre français a un fort accent bernois. N’arrivez- vous pas à vous en débarrasser ? »
J.Z:
J’aurais bien aimé m’en débarrasser, mais je n’y parviens pas.J’ai pris des cours à Genêve,J’ai essayé tout ce qui était possible. En vain.A Paris, l’accent ne joue aucun rôle.D’abord parce que beaucoup de gens en ont un et ensuite parce que l’important c’est d’avoir quelque chose à dire. A Genêve, il en va tout autrement; on se moque des « totos » , les Suisses alémaniques et on peste contre eux.En fait, à Genêve, avec un accent pareil, on ne peut pas être élu au Conseil National.J’y suis arrivé uniquement parceque je publie à Paris et que je fais des apparitions à la télévision française.
Interviewer:
« Problème principal : tout le monde parle anglais! »
J.Z;
Pas l’anglais…l’américain primitif.
Interviewer:
…« à l’intérieur même de la Suisse ; quand un habitant de Saint Gall rencontre un habitant de Genêve, ils s’entretiennent souvent en anglais. »
J.Z:
Oui, c’est bien ça! C’est un mythe de prétendre qu’en Suisse les différentes cultures vivent ensemble. Elles vivent côte-à-côte. J’ai remarqué cela au Conseil National et chez mes étudiants à Genêve.Ils connaissent par coeur les programmes des théatres de Paris, ils connaissent Lyon comme leur poche. Par contre pendant toute la période où j’ai enseigné à Genêve, je n’ai rencontré qu’un ou deux de mes étudiants qui aient mis les pieds à Appenzell.
Interviewer:
" En prenant le problème en sens inverse, la passion des Suisses alémaniques pour la francophonie est limitée."
J.Z:
Cela tient à des causes historiques. L’invasion française fut , pour certains, au Pays de Vaud, par exemple, une libération. Ailleurs, comme en Suisse centrale, les Français passent pour des colonisateurs et des pillards.Que les Français aient imposé leurs valeurs en Suisse , par les armes, à la fin du XVIIIéme siècle et au début du XIXème, beucoup de gens ne l’ont, jusqu’à maintenant , pas encore digéré. Mais il est un fait; sans le diktat français,la République helvétique et l’Acte de Médiation, aucun état fédéral n’aurait pu voir le jour en 1848 et li n’y aurait pas de Suisse moderne.
L’interview en allemand 'in extenso);
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