L'Alsace, l'Allemagne et la France

Française depuis le traité de Westphalie, puis ballotée de part et d’autre de la frontière au gré des guerres, la question que je me suis toujours posée, c’est « quand est-ce que l’Alsace s’est-elle sentie française ? ».
Un grand débat d’historiens (pour avant 1870), un grand débat culturel (cela n’a pas été si tranché entre 1918 et 1940, l’intégration a voulu se faire au forceps ce qui n’était pas du goût de tous) et les « dualistes » (adeptes de la double culture) sont encore beaucoup plus nombreux qu’on ne le croit de nos jours.
Pour les étrangers qui étudient l’histoire de l’Alsace, cela reste un grand mystère.
Pour ma part, je pense que cela date de la Révolution française.
Vos avis ?

L’Alsace a été 600 ans sous la férule germanique et 300 ans sous la férule « romane ». Ca explique pas mal de choses.

Quoique « férule » soit un peu fort. Le Saint-Empire était une entité très vague, et on ne parle pas d’« Allemagne », au contraire du pouvoir centralisateur de la France. D’ailleurs, jusqu’à la Révolution, l’Alsace jouit d’un régime d’autonomie religieuse et linguistique remarquable par rapport aux autres provinces. La langue allemande est la langue usuelle de l’enseignement et des actes officiels. On pourra vraiment parler de « férule » après la Révolution. (« Les femmes alsaciennes sont invitées à quitter les modes allemandes puisque leur coeur est français »).

Pauvres Alsaciens qui sont toujours sommés soit de la part des Français, soit de la part des Allemands, de choisir leur camps et ne peuvent jamais être eux-mêmes. :mouaif:

Pour la langue d’usage avant la révolution, ce n’est pas aussi tranché. Je t’invite à une fouille approfondie dans les archives (elles sont en ligne, cela tombe bien !! mais il faut souvent des talents divinatoires tellement c’est mal écrit) : c’est pour part en français, pour part en allemand (surtout en milieu rural) et pour certains trucs, d’ailleurs c’est le latin !!!

Pour moi l’Alsace n’a été « allemande » que pendant 2 périodes (1871-1918 et 1940-1944), avant elle était de culture germanique puisque l’Allemagne n’existait pas encore. C’est assez intéressant d’ailleurs de voir comment l’annexion de duché de Bade ou du royaume de Bavière ont été véçus par la population.

Pour l’autonomie religieuse, oui, la révocation de l’Edit de Nantes ne s’est pas appliquée en Alsace, mais pour le reste, il faut appeler au delà de ce qui écrit dans les livres d’histoire. Il y a tout de même eu pas mal de brimades pour tenter d’inverser la tendance religieuse. D’où cette défiance d’une part des protestants contre le pouvoir français.

Pendant que j’y pense et avant que j’oublie…des choses qui arrivent à mon âge, un site très instructif sur la germanisation des toponymes en Alsace-Lorraine (1871-1915)…quelques fois, l’autorité allemande trouvant la forme consacrée pas assez germanique, la modifiait à nouveau.
Au passage, la forme allde de « La Broque »…Vorbruck m’a permis de comprendre où se terminait La Broque (avant le pont sur la Bruche)…et où commençait Schirmeck…déduction logique…après, alors qu’aujourd’hui, ces deux petites villes sont en continuité. :smiley:
http://exonyme.bplaced.net/Board/Thread-Die-Ortsnamenverdeutschung-in-Elsaß-Lothringen-1871-1915

Merci pour le lien !
Vu certains toponymes, je me disais qu’au moins la France n’avait pas trop voulu franciser les noms, malgré la difficulté à les prononcer pour un non alsacien, du style Breuschwickersheim ou Schwindratzheim.
Mais j’avais oublié que Bouxwiller avait été Buchsweiler et toute ces petites choses.
Et que les allemands n’avaient pas été en reste.
L’Alsace est une source inépuisable de découvertes et de remise en question des « vérités absolues » des livres d’histoire (j’en ai des 2 « côtés », aucun n’est en reste avec un certain esprit de propagande).

Bonjour,
Une chose m’étonne lorsque l’on parle de l’Alsace et, partant, des tumultueuses relations entre la France et l’Allemagne, c’est que tout le monde semble avoir oublié René schickelé, grand auteur du début du 20ème siècle. C’était pourtant un précurseur, qui rêvait d’Europe (« je suis citoyen français und deutscher Dichter ») et considérait l’Alsacien comme une passerelle entre nos deux langues. Il y a des choses très émouvantes et d’autres plus amusantes, comme le poème « Jetz red i in mina sproch… » A redécouvrir absolument.

Il existe une René Schickele - Gesellschaft et des René Schikele- Kreise, qui oeuvrent dans le même sens que l’écrivain et publient un mensuel très interessant intitulé :"Land un Sproch " avec articles en français, en allemand et en alsacien .
Amusant de constater que l’article wikipedia sur cette societé n’existe qu’en alémanique…et en catalan.

Edit: ce serait peut-être sympa de passer par la case départ :wink:
http://www.allemagne-au-max.com/forum/hallochen-j-suis-nouveau-et-je-me-presente-vf25.html

pendant la seconde guerre mondiale il y avait une expression : Allemand ne veut, Français ne peut, Alsacien suis…

jusqu’à la fin du XXe siècle j’ai compris que ma famille alsacienne avait choisi son camp : l’Alsace

quand j’y allais ils disaient « les français de l’intérieur » (quand on rentrait sur Paris on retournait en France) et quand ils parlaient des allemands ils disaient « les bosch »

personnellement sans jamais y avoir vécu, je me considère d’ascendance française, allemande et Suisse

pour ce qui est des archives, faisant moi-même mes recherches aux AD67 et 68, le latin est bien employé pour les actes de BMS mais ce n’est pas une langue d’usage à proprement parlé mais seulement utilisé par les curés et autres érudit, les alsaciens parlaient l’allemand et/ou l’alsacien, le français commence sont balbutiement après la première guerre mondiale et prend son essort après la seconde
au décès de ma grand-mère en 1993 à l’église les chants étaient en alsacien et en latin

mes grands-parents nés en 1910 parlaient l’alsacien, l’allemand et un peu le français, une arrière-grand-tante née en 1901 ne parlait qu’allemand et ceci jusqu’à leur mort dans les années 80/90

je rejoins Michelmau pour dire que l’Alsace n’est dans le giron français que depuis le XVIIe siècle

Site supprimé cependant, contenu archivé :
archive.is/gGvnd
archive.is/aqxi3
archive.is/GCyQV
archive.is/wbWJZ
archive.is/c7js9
archive.is/QUHae

Merci pour ces très intéressantes informations sur la toponymie. :wink:

La France a fait ce qu’elle a pu, personne n’a trouvé d’équivalent à des noms à coucher dehors sur les grands boulevards parisiens qui ne posent ne problème à personne en Alsace.
Neuendorf est devenu Village-Neuf, pas vraiment une grande réussite… Les génies de la république laïque et indivisible ne sont pas des créatifs.

Burnhaupt le Haut, Burnhaupt le Bas !!

oui je te donne raison :laughing:
ils auraient pu choisir Rateauville

puisque chaque année :
fr.wikipedia.org/wiki/Burnhaupt-le-Bas

Peut-être un peu HS , quoique…
Ca m’a toujours fait marrer cette volonté de vouloir réduire les toponymies locales à une forme « française " in-signifiante ( tiret mis à dessein ).
Quelques exemples pris dans la toponymie bretonne :
Concarneau …( con + carneau…c’est qui ce carneau ? )
En breton « Konk Kernev »… » anse de Cornouaille « .
Le Conquet …
En breton : « Konk Leon »… » anse du Léon".
Guérande…
En breton « Gwennrann »…" le secteur blanc"…en raison de la couleur du sel des marais salants.
Je ne suis ni basquisant ni occitanisant , mais je pense que , là aussi , on pourrait trouver des « traductions » de toponymes qui n’ont aucun sens.

Veroa dit : pendant la seconde guerre mondiale il y avait une expression : Allemand ne veut, Français ne peut, Alsacien suis…

Je suis sans doute hors sujet, mais y aurait-il un lien entre malouins et alsaciens ? Il y a un dicton breton qui dit : « Maloui sûrement, Breton peut-être, et français s’il en reste… »

Les malouins étant des habitants de St Malo, et non ceux des îles Malouines… :slight_smile:

En tout cas, pour en revenir aux Alsaciens, j’ai lu le livre « Nos années françaises » de Marie Hart, suite au sujet de Michelnau concernant ce roman et j’étais loin de me douter des déchirements humains et culturels qu’on vécu ces familles alsaciennes, qui semblaient plus proches des allemands que des français à cette époque. J’ai d’ailleurs adoré ce roman et l’ai littéralement dévoré.

Petite faute de frappe, Michelmau ( et non Michelnau… :blush: désolée pour la coquille).

a voir comme ils font fonctionner leur dialecte, ou langue Alsacienne, un peu comme les Luxembourgeois, tu as raison sur ton dicton , ils sont Alasaciens :laughing: