Dans une interview accordée à Young Germany, Pierre Jarawan, slameur allemand chevronné, dévoile les ficelles de son art et livre ses conseils contre le trac.
Young Germany : Bonjour, Pierre ! Tu animes actuellement des rencontres de slam au Cord Club de Munich. Pourrais-tu expliquer rapidement à nos auditeurs en quoi consiste le slam ?
Pierre Jarawan : Avec plaisir ! Le slam est une joute poétique à laquelle participent des poètes amateurs ou professionnels, et à l’issue de laquelle le public désigne le vainqueur. En principe, il n’y a que trois règles à respecter : le slameur doit être l’auteur de son texte, sa prestation ne doit pas dépasser six minutes et il ne doit pas utiliser d’accessoires. Sinon, il n’y a aucune contrainte sur le plan formel : on peut faire du slam en vers, en prose, en ce qu’on veut.
Young Germany : À quoi reconnaît-on un bon slameur ?
Pierre Jarawan : Je dirais que c’est quelqu’un qui vit son texte. A priori, je crois qu’il n’y a pas de recette miracle pour devenir un bon slameur ; il faut surtout aimer le texte qu’on a écrit et croire en soi au moment de le présenter sur scène. Dans l’idéal, il faut maîtriser le contact avec l’auditoire aussi bien que son texte. La performance joue toujours un rôle important.
Young Germany : Tu es toi-même un poète expérimenté. J’ai lu sur Internet que tu avais remporté environ 80 victoires ces deux dernières années, c’est-à-dire une par semaine en moyenne. Est-ce à dire que les slameurs voyagent beaucoup ?
Pierre Jarawan : Oui, tout à fait. Ces deux dernières années, j’ai parcouru 30 000 ou 35 000 kilomètres en train. Je vais un peu partout, et c’est vrai qu’on change de ville toutes les semaines. […]
Young Germany : Ces voyages te mènent-ils aussi à l’étranger, ou principalement en Allemagne ?
Pierre Jarawan : Je me rends dans toute l’aire germanophone : en Allemagne, en Autriche, en Suisse et parfois au Luxembourg.
Young Germany : Il semblerait que Munich soit l’un des berceaux du slam en Allemagne, ou, du moins, que la ville soit très active en la matière, et ce depuis un certain temps. Dirais-tu qu’il existe un mouvement s’étendant à toute l’Allemagne, voire au monde entier ?
Pierre Jarawan : Il serait exagéré d’affirmer que le mouvement est mondial, mais il est sans aucun doute international. Il est né à Chicago, puis il est arrivé très rapidement en Europe. En Allemagne, tout a commencé à Berlin, mais il y a d’autres fiefs très actifs, comme Munich, effectivement, ou encore Hambourg. Le slam est en plein essor, et c’est le cas un peu partout en ce moment.
Young Germany : Si je peux me permettre une question personnelle, qu’est-ce qui t’a poussé à te mettre au slam ?
Pierre Jarawan : Ce sont des amis qui m’ont convaincu d’essayer. Je ne savais pas du tout ce que cela donnerait. […]
Young Germany : Est-ce que tu as toujours le trac aujourd’hui ?
Pierre Jarawan : Cela dépend dans quel cadre. Ce n’est pas le cas ce soir, par exemple, car mon rôle reste secondaire. En revanche, quand il s’agit d’événements plus importants, j’ai évidemment le trac, mais c’est plutôt bon signe, je crois.
Young Germany : Oui, le trac est parfois une bonne chose. Mais existe-t-il des techniques pour le limiter ?
Pierre Jarawan : À ma connaissance, il n’y a qu’une solution : se produire aussi souvent que possible. À la longue, le trac diminue, mais il ne disparaît jamais. Cependant, comme je le disais à l’instant, je crois que c’est important pour réaliser une bonne performance.
Young Germany : Une dernière question : y a-t-il un site internet que tu recommanderais tout particulièrement à nos auditeurs ?
Pierre Jarawan : Oui, www.myslam.de, qui fournit une excellente vue d’ensemble. On y trouve notamment un calendrier où figurent les rencontres de slam organisées dans toute l’Allemagne. Vous seriez surpris de voir à quel point elles sont nombreuses. En théorie, on pourrait s’y rendre toutes les semaines, voire tous les soirs.