Thomas Harlan vient de mourir à l’âge de 81 ans à Berchtesgaden des suites d’une longue maladie pulmonaire.
Son nom ne dira sans doute pas grand chose à la plupart des forumeurs, par contre, si je mentionne le nom de son père Veit Harlan, cela dira sans doute quelque chose aux plus âgés d’entre nous. Veit Harlan était en effet un cinéaste talentueux, qui malheureusement avait mis son talent au service de l’idéologie nazie et particulièrement de l’antisémitisme dans son film « Jud Süß », en français « le juif Süss » salué par Josef Goebbels comme un chef-d’oeuvre.
Veit Harlan n’avait jamais vraiment été inquièté et n’avait pas non plus émis de remords sur son passé.
La vie de son fils Thomas a été un constant réglement de compte avec un père au passé bien peu glorieux.
Ecrivain et cinéaste lui-même, il consacra toute son oeuvre et toute son énergie au travail de mémoire sur la période du IIIème Reich.
A la fin de la guerre, il s’installa à Paris où il vécut longtemps et tissa des liens avec les mouvements communistes et les mouvements de libération du monde entier.
Au début des années 60, il effectua des recherches dans les archives polonaises, françaises et soviétiques qui permirent de mettre en accusation plusieurs milliers de criminels de guerre qui étaient passés au travers des mailles du filet.
La question qui le hantait en permanence au cours de ses recherches; « Comment a-t-il été possible qu’en Allemagne, des gens qui ont pu contribuer à l’élimination de millions de personnes n’aient été ni inquiètés ni poursuivis ? »
Encore un témoin qui disparait.
hors sujet : pas qu’en Allemagne… je me suis posée la question l’autre soir devant la télé, au sujet de ce « fameux » préfet de police de paris… l’année 1961… en pleine guerre d’algérie… le préfet… Papon pour ne citer que lui…
J’ignorai effectivement l’existence de THomas Harlan et surtout la prise de tête qu’il a du se faire en pensant à tout ce que son cher papa avait fait du temps du 3ème Reich…
avant même de lire la 1ère réponse, j’avais tout de suite le nom de Papon à l’esprit et il y en a certainement beaucoup que l’on ne connait pas.
d’ailleurs en lisant les mémoires de mon père qui est resté en France pendant la 2e guerre mondiale, il y a une phrase qui m’a interpellée : « les pires ce n’étaient même pas les allemands, mais les français qui collaboraient avec l’occupant, on avait l’impression qu’ils en faisaient 2 fois plus pour bien se faire voir » (et pas que des hauts dirigeants). pas seulement pour traquer les juifs, mais aussi pour organiser les raffles pour le travail obligatoire.
d’ailleurs qui connait seulement le passé des gens quand il a été peu glorieux (à moins d’avoir fait la une des journaux) ? on raconte plus volontier ses mémoires quand on a été du « bon côté ». est-ce que les petits-enfants de ces personnes au passé obscure le savent seulement ? est-ce que les allemands demandent ce qu’ont fait leurs grands-parents pendant la guerre ou est-ce toujours un grand tabou ?
quelle est à la part entre le travail de souvenir et la nécessité d’aller vers l’avant (les allemands parlent de 1945 comme d’un nouveau départ) ?
pour la plupart était-ce une conviction profonde ou un aveuglement passager ?
ce qui est « drôle » avec Thomas Harlan, c’est que pour aller contre l’engagement de son père par rapport au IIIe Reich, il a tissé des liens avec des mouvements qui n’ont pas forcément meilleure réputation (certains communistes de par le monde n’ont vraiment pas beaucoup à envier aux nazis). je ne connais pas le détail de ces liens et de sa capacité à dire à un certain moment « non, je ne cautionne pas plus cela ».
peut-être que ceux pour lequel j’ai le plus d’admiration c’est ceux qui étant dans un système dictatorial ont eu le courage d’en sortir (c’est confortable d’être dans le camp de ceux qui commandent) ou … à faire en sortir leur pays.
Bien que plus jeune que Thomas Harlan, je peux très bien comprendre. Je ne suis pas de la même génération que lui, mais je suis né en 1946, dans une petite ville du grand est qui avait été bombardée à près de 90 %, , soit un an après la guerre, et je peux te dire que dans le milieu dans lequel je vivais, je connaissais des tas de résistants, principalement des communistes , enseignants , cheminots, qui étaient respectés pour leur action de résistance. Pour moi, adolescent, le communisme représentait une espérance d’une société plus juste. D’ailleurs, dans le conseil national de la résistance fondé, si je ne m’abuse en 1944, figuraient de nombreux communistes et ce même conseil avait apporté des acquis sociaux considérables ( que l’actuel gouvernement et le patronat actuel s’efforcent de remettre en cause…voir les déclarations de Denis Kessler, un des dirigeants du Medef, contestataire en 1968 …sur le sujet.) Bon, mais là, je sors du sujet.
Le rapport Kroutchev et la déstalinisation, c’est 1956 seulement !!! Faut remettre les choses dans leur contexte.
c’est pour cela que j’ai dit certains.
je pense aussi que c’est justement parce que la libération doit beaucoup aux résistants communistes et que l’URSS était du côté des alliés, que nous avons une « idéalisation » post-guerre du communisme qui ne saurait faire oublier les atrocités qui ont été comises et d’ailleurs qui sont toujours comises au nom de cette idéologie.
d’ailleurs on fait beaucoup de choses au nom d’idéologies qui en définitive ne servent que des ambitions dictatoriales personnelles.
c’est aussi dangereux de faire de l’angélisme d’extême gauche, que d’angélisme d’extrême droite.
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J’ai essayé de cliquer sur ce lien mais il semblerait que la vidéo ait été retirée.
Contrairement à ab2002 qyu écrit
…
Même si certes je n’étais pas née dans les années 50, je n’avais jamais entendu parler de cette personne ni du passé très discutable de son père Veit Harlan.
Cependant ce passé paternel me fait penser à celui d’une Leni Riefenstahl. Non ???
Christiane Harlan Kubrik est la nièce de Veit Harlan.
Voir le documentaire « Autour du Juif Süss » qui vient de passer sur la chaîne Histoire et qui donne, entre autres, une généalogie très détaillée de la famille de Veit Harlan.