Source : Les Nouvelles d’Allemagne du 12.06.06
Grâce à l’AbiBac, le français et l’allemand connaissent un regain d’intérêt.
Actuellement, les lycéens planchent simultanément sur le baccaulauréat et son équivalent allemand, l’Abitur. Les titulaires de ce double diplôme espèrent ainsi avoir de meilleures chances sur le marché du travail.
Sur le site Internet du Luisen-Gymnasium de Düsseldorf résonnent en alternance les accords de la Marseillaise et de l’hymne national allemand. Avec ces deux airs patriotiques, cet établissement scolaire fait la promotion d’un diplôme qui connaît un succès croissant en France et en Allemagne : l’AbiBac - contraction d’Abitur et baccalauréat. « L’intérêt est énorme » affirme Michael-Georg Müller, qui enseigne - en français - l’histoire à près de 60 élèves des classes AbiBac. Certains lycéens effectueraient même jusqu’à une heure et demi de trajet en train pour pouvoir suivre cette formation franco-allemande.
Depuis sa création il y a douze ans, de plus en plus d’établissements scolaires participent à ce cursus. En Allemagne, ils sont aujourd’hui au nombre de 41 et d’autres Gymnasien (lycées) doivent commencer en septembre. En France, 28 lycées préparent actuellement à ce double diplôme et d’ici 2008, chacune des 30 académies françaises veut proposer ce cursus dans au moins l’un de ses établissements.
« Les demandes sont de plus en plus nombreuses et la réussite à cet examen atteint près de 95% » déclare un porte-parole du ministère de l’Éducation nationale à Paris. Grâce à l’ AbiBac, l’intérêt pour la langue du pays partenaire connaît en outre un renouveau. « Les élèves espèrent avoir de meilleures chances sur le marché du travail grâce à ce diplôme unique en Europe - cela les motive considérablement. »
De la motivation, il en faut aux élèves préparant l’AbiBac - de même qu’une bonne dose de courage et d’endurance. « Ceux qui font ce choix ne doivent pas reculer devant l’effort » prévient d’ailleurs Anne-Marie Meyer, directrice du lycée international de Strasbourg. En effet, le programme compte 11 heures hebdomadaires de cours dispensés en allemand (pour les élèves français) ou en français (pour les élèves allemands) - aussi bien en langue et littérature qu’en histoire et géographie.
Aurélia Lefevre, 18 ans, scolarisée au Lycée Monod à Enghien-les-Bains, près de Paris, a choisi pour l’étude de texte un extrait de La vie de Galilée, de Bertolt Brecht. Elle a en outre traduit un texte de Theodor Fontane en français. Conformément aux règles de l’AbiBac, chaque copie est corrigée à la fois par un professeur allemand et un professeur français. « Cela fonctionne très bien ; la plupart du temps, il n’y a quasiment aucune différence », affirme Friedhelm Dirk, ancien directeur du Gymnasium Friedrich-Ebert de Bonn, un établissement précurseur puisque c’est là que la première classe allemande préparant l’AbiBac a été ouverte, en 1987, à titre expérimental. « Les sceptiques étaient nombreux au début », se souvient M. Dirk, aujourd’hui âgé de 63 ans. En effet, les Français étaient persuadés que leur baccalauréat était le meilleur au monde, et les Allemands, de leur côté, avaient la même opinion au sujet de leur Abitur. Par ailleurs, les concepts pédagogiques étaient très différents. Pourtant, en dépit de tous ces mauvais présages, les « courageux pionniers » ont obtenu leur AbiBac en 1990 et, quatre ans plus tard, l’expérience s’est transformée, grâce à un contrat passé avec l’État, en institution durable.
Depuis, plus de 6.000 jeunes Français et Allemands ont obtenu un baccalauréat franco-allemand et parmi eux, nombreux sont ceux qui ont ensuite fait leurs études dans le pays voisin. « Nous recevons de très nombreuses demandes précisément de la part d’écoles proposant l’AbiBac », confirme Ulrike Reimann, de l’Université franco-allemande à Sarrebruck, une fédération regroupant 145 établissements d’enseignement supérieur français et allemands qui proposent des cursus franco-allemands. Les étudiants qui décrochent un double diplôme augmentent considérablement leurs chances de trouver rapidement un travail. D’après une enquête effectuée par cette fédération, seuls 5% d’entre eux sont encore à la recherche d’un emploi six mois après la fin de leurs études.
(Jutta Hartlieb, AFP)