Il y a 80 ans, le régime nazi organisait le boycott des magasins juifs
2 avr. 2013
C’était un samedi. Adolf Hitler était au pouvoir depuis à peine deux mois. Le 1er avril 1933, l’exclusion systématique des juifs de la vie publique débutait dans l’Allemagne nazie avec l’organisation du boycott systématique des magasins juifs. Un jour de sombre mémoire.
Il était 10 heures, ce matin-là, lorsque des S.A en uniformes, parfois armés, se postèrent devant les magasins juifs de toute l’Allemagne pour en interdire l’accès aux citoyens allemands.
La consigne donnée était claire : « Allemands ! Défendez-vous ! N’achetez pas chez les juifs !». Elle s’affichait partout en grosses lettres, dans les vitrines, sur des affiches… Pas un hameau d’Allemagne ne devait faire exception. Les médecins et les avocats juifs subissrent le même sort que les commerçants. Le boycott s’accompagna de violences et de pillages.
Antisémitisme d’État
À l’époque, un tel appel au boycott n’avait rien de nouveau. La République de Weimar, dans les années 1920, avait déjà connu de telles flambées d’antisémitisme. Ce qui tranchait avec le passé, en revanche, c’était le fait que l’action n’était pas seulement tolérée par les pouvoirs publics, mais directement organisée par l’État.
Au départ, la durée de ce boycott ne fut pas fixée. Il fut finalement « suspendu » dans la soirée, puis aboli trois jours plus tard.
À l’étranger, en effet, Etats-Unis et Grande-Bretagne en tête, il avait suscité l’émoi. Un boycott des marchandises allemandes avait même été envisagé. Les associations juives elles-mêmes n’y étaient néanmoins pas favorables, craignant des représailles sur les juifs allemands.
Par ailleurs, certaines catégories de la population allemande, notamment dans les milieux catholiques, avait affiché sa réserve. Elle témoigna parfois même sa solidarité aux juifs concernés par le boycott.
Ces réactions freinèrent l’élan des nazis, mais ne l’arrêtèrent pas. Le début d’avril 1933 marqua ainsi le début de la persécution des juifs par le régime.
Persécution systématique
Une semaine plus tard, en effet, le 7 avril, une « loi sur le rétablissement du fonctionnariat » mettait presque tous les « non-aryens » de la fonction publique à la retraite d’office (à l’exception de quelques catégories, comme les anciens combattants).
C’était là la première étape d’une exclusion progressive et systématique des 500 000 juifs d’Allemagne de la vie économique. En septembre 1935, les lois de Nuremberg, puis 13 autres législations, leur barrerront finalement l’accès à presque toutes les professions. Simultanément, les juifs se virent aussi retirer tous leurs droits et libertés civils.
Ainsi, déchaînement de violence antisémite orchestré par le régime nazi culminera à nouveau le 9 novembre 1938, lors de la Nuit de Cristal, avant d’aboutir, quelques années plus tard, à la déportation et à l’extermination massive des juifs d’Allemagne et d’Europe.