Les couples franco-allemands séparés se déchirent encore trop souvent en ce qui concerne l’autorité parentale, les parents français accusant la justice allemande de les désavantager. Le problème n’est pas nouveau, puisqu’en 1999, une commission de médiation avait été créée par Berlin et Paris. Mais il persiste : l’Allemagne considère l’enfant franco-allemand « comme allemand avant tout » et « la France n’applique pas le même raisonnement », indique Claude Ney, membre de cette commission.
Dans la plupart des conflits au sein des couples franco-allemands séparés, il s’avère que c’est le père français qui cherche généralement à maintenir un contact avec son enfant parti vivre en Allemagne avec sa mère allemande. Les associations de parents français dénoncent « les déplacements illicites d’enfants vers l’Allemagne, rarement sanctionnés par la justice locale, avec des droits de visite non respectés, ou des décisions rendues en l’absence du parent français, qui n’en est souvent informé qu’a posteriori », fait savoir l’Agence de Presse français.
L’AFP s’est d’ailleurs procuré l’acte de naissance allemand de « Joséphine Chevalier », trois ans et demi, vivant à Postdam avec sa mère, et fille de François Chevalier, médecin français de 54 ans, pour constater que la ligne « Père : » était laissée vide et que la petite fille portait le nom de famille de sa mère dans la transcription de son acte de naissance dans les fichiers allemands. L’enfant est née à Dieppe, de parents non mariés, et est titulaire d’une carte d’identité française au nom de « Joséphine Chevalier ». Après trois années de procédures judiciaires entre les deux pays, M. Chevalier ne parvient que difficilement à garder un contact régulier avec sa fille. Et son avocat, Me Jean-Patrick Revel, qui a intenté un recours en justice, estime que la transcription de l’acte de naissance en allemand a été « établi en violation d’une convention franco-allemande de 1961 sur la reconnaissance mutuelle des actes d’état civil ».
« Différences culturelles »
Pour expliquer ces conflits récurrents, un haut magistrat spécialisé en droit familial au sein du ministère de la Justice à Berlin évoque les « différences culturelles » : « la mentalité allemande est imprégnée de l’idée que l’enfant a besoin avant tout de sa mère, et que le père ne joue qu’un rôle secondaire dans son éducation », explique-t-il.
La commission de médiation, dont s’étaient dotés Paris et Berlin en 1999, avec trois parlementaires de chaque pays, a été saisie d’une centaine de cas depuis 2000. Et « neuf fois sur dix, souligne Claude Ney, l’un des membres de cette commission, c’est le parent français qui se plaint de l’attitude de l’Allemagne ». « Le problème de fond, c’est que l’Allemagne considère toujours un enfant franco-allemand comme allemand avant tout, alors que la France n’applique pas le même raisonnement, ce qui crée deux poids, deux mesures, analyse M. Ney. Il y a un vrai blocage côté allemand, et un manque de volonté évident côté français pour protester ».