Désintérêt pour la politique ? Perte de confiance dans les institutions ? Crise des partis politiques ? Contrairement aux apparences, la culture politique est loin, en Allemagne, de traverser la crise souvent dénoncée. Selon une étude de l’institut pour la démoscopie d’Allensbach, l’adhésion aux principes démocratiques ne cesse de progresser. « La société allemande présente aujourd’hui les caractéristiques d’une démocratie mature », affirme Thomas Petersen, qui en détaille les résultats dans les colonnes du « Frankfurter Allgemeine Zeitung » (27.01.2010).
Les résultats de l’étude apportent plusieurs preuves que la culture démocratique est de plus en plus ancrée en Allemagne, par-delà les errements de la politique politicienne. Ainsi, les Allemands sont de plus en plus nombreux à souhaiter que les décisions soient prises par le plus grand nombre plutôt que par une élite -quitte à ce que la démarche soit plus lente et erratique. Ils sont 72 % à partager cette opinion, contre 55% en 1959.
Intérêt réel pour la politique
Contrairement aux apparences, les citoyens allemands s’intéressent autant à la politique qu’il y a vingt ou trente ans. Près d’un sur deux (47 % à l’Ouest, 43 % à l’Est) répond « oui » à la question « Globalement, vous intéressez-vous à la politique ? ». Cette proportion a peu évolué depuis le pic atteint en 1983. En 1952, seuls 27 % des Allemands (de l’Ouest) répondaient par l’affirmative.
L’idée que les citoyens n’ont pas de prise sur la réalité ne domine pas davantage le climat politique. À l’Ouest, une majorité relative se juge, certes, impuissante. Mais une forte minorité (30 %) rejette clairement cette notion d’impuissance. À l’Est, cette minorité est de 20%. Mais elle est en augmentation (5 points de plus qu’en 1992). Selon M. Petersen, la confiance est affaire de temps après des années de dictature : dans les « nouveaux Länder », elle se reconstitue progressivement comme elle l’a fait à l’Ouest après la Seconde Guerre mondiale.
Des citoyens engagés au service des autres
Dernier indice de l’attachement à la démocratie, la vigueur de l’engagement bénévole montre que les Allemands sont tournés vers la solidarité plutôt que vers le rejet de l’autre. Associations, églises, organisations sociales, casernes de pompiers et autres structures d’aide ont vu le nombre de leurs bénévoles plus que tripler depuis les années 1950. Et ces bénévoles affirment à 85 % recevoir le soutien de leurs familles.
Leçons pour aujourd’hui
M. Petersen puise dans ces résultats des motifs d’optimisme à plus large échelle. Lorsque l’on compare la situation actuelle de la démocratie en Allemagne avec celle des années 1950, « on constate qu’un système de gouvernement libéral a besoin d’un profond ancrage culturel au sein de la société, et que ce dernier n’apparaît pas en un jour, mais croît sur plusieurs générations. Peut-être serait-il parfois utile de se le remémorer lorsque l’on débat de la construction de structures démocratiques dans d’autres pays », conclut-il.