Source: Les Nouvelles d’Allemagne du 28.02.06 publiées par le CIDAL
Débat sur l’introduction d’un salaire minimum
A l’image de ce qui existe déjà dans 18 pays européens, dont la France, l’Allemagne envisage la création d’un salaire minimum légal. Le ministre du Travail et des Affaires sociales, Franz Müntefering a déclaré samedi qu’il ferait des propositions d’ici à l’automne, après avoir examiné les modèles existants dans les pays voisins.
« Toute personne qui travaille doit recevoir un salaire lui permettant de se nourrir et de nourrir sa famille », explique M. Müntefering. C’est la raison pour laquelle le gouvernement allemand met actuellement à l’étude plusieurs options destinées, d’une part, à inciter financièrement les chômeurs peu qualifiés à accepter une activité, et de l’autre à empêcher toute dérive vers des salaires extrêmement bas. Le gouvernement examine ainsi l’idée d’introduire un « salaire mixte » qui serait composé d’une rémunération très faible pour des tâches peu qualifiées et, en complément, d’une aide de l’Etat rendant la reprise d’activité attractive. L’idée de créer, par ailleurs, un salaire minimum permettrait alors d’empêcher les employeurs de pratiquer une surenchère salariale à la baisse, et les coûts de la mesure d’exploser de manière imprévisible. Elle garantirait également une protection aux salariés peu qualifiés. « Avec le salaire mixte [.] et le salaire minimum, nous voulons, d’ici à la fin de l’année, empêcher les salaires de tomber en chute libre », a réaffirmé aujourd’hui M. Müntefering.
Dans l’immédiat, M. Müntefering a refusé de se prononcer sur le montant d’un éventuel salaire minimum. Dans le débat public, des chiffres allant de 6 à 7,50 euros sont cités comme plancher. Le président du syndicat IG BCE, Hubertus Schmoldt plaide, pour sa part, pour des salaires minimums fixés branche par branche, afin de préserver l’autonomie tarifaire. Le « patron des patrons », Dieter Hundt, président de la fédération patronale BDA, s’y oppose, en revanche, estimant que leurs effets seraient pires que ceux d’un salaire minimum unique.
En effet, l’idée d’introduire un salaire minimum ne va pas sans susciter de débat outre-Rhin. Dieter Hundt et l’économiste Wolfgang Franz, président de l’Institut ZEW, y voient une fausse bonne idée. Elle conduirait, selon eux, à détruire des emplois et à réduire les chances des chômeurs peu qualifés au lieu de les accroître. M. Franz invoque l’expérience française du SMIC, et constate que « son introduction a essentiellement conduit à une forte augmentation du chômage des jeunes peu qualifiés ». Les emplois faiblement rémunérés seraient purement et simplement délocalisés vers des pays où les salaires sont plus bas, comme la Pologne, estime-t-il encore. L’économiste ne juge pas non plus que l’introduction d’un salaire minimum se justifie comme garde-fou financier lors de la création de « salaires mixtes ». « Vouloir remédier aux effets secondaires non-souhaités d’un médicament supplémentaire douteux, le salaire mixte, à l’aide d’un autre remède inadapté, le salaire minimum, n’a pas de sens » à ses yeux.