En vous lisant, je me suis dit que nous pourrions mener un débat sans fin sur le pour et contre une institution comme la commémoration du 11 novembre.
Je suis né en 1961, en Allemagne. Mon grand-père est né dans l’Empire, mon père dans la République de Weimar – et il a grandi au 3ème Reich – quant à moi, je suis né en République Fédérale, et ma fille dans l’Allemagne réunifiée.
A chaque changement de génération, il y eut une autre, une nouvelle définition de la nation, du citoyen, du sujet, peut-être même de l’Homme pour certains. De plus, regardé de près, chaque changement de génération correspond à une crise, économique, politique, guerrière, une coupure nette.
De père en fils, nous avons souvent l’impression de provenir non pas d’horizons, mais de mondes si différents que seuls les comptes rendus historiques peuvent nous aider à bâtir des ponts. Ce qui est une approche quand même très pragmatique.
Pour moi, le 11 novembre a commencé à avoir une signification réelle quand je vivais en France. Je l’ai aperçu comme un élément parmi d’autres jouant un rôle important dans l’identité des Français, qui vivent dans un pays qui a connu infiniment plus de continuité que l’Allemagne. Ce qui ne veut pas dire qu’une commémoration institutionnalisée ne peut être dépoussiérée, voire remise en question.
Pas impossible qu’un héritage d’un tout autre genre se manifeste aujourd’hui d’une manière inattendue. J’ai du mal à le croire, mais ne trouve pas cela absurde : le 11 novembre à 11 heures 11, les conseils des 11 fait démarrer la période du carnaval, censé renverser symboliquement l’ordre en place.
Le chiffre 11, elf, aurait son origine dans la Révolution Française et son idéal de l’Egalite-Liberté-Fraternité, ELF, à une époque où les citoyens étaient dépossédés de leurs droits. Les premiers conseils des onze se seraient formés à l’époque napoléonienne, comme une forme subtile de résistance à l’occupant, qui dictait un ordre à lui à un continent entier, et aux peuples qui y vivaient.
Napoléon n’est pas un héros pour les Allemands. Les perceptions des évènements, des personnes, des institutions sont différentes d’un pays, mais aussi d’une génération à l’autre.